N’y aura-t-il bientôt plus qu’un seul pilote dans l’avion au lieu de deux ?
Bientôt un seul pilote dans l’avion ? Selon l’agence de presse américaine Bloomberg, de nombreuses compagnies aériennes et autorités de réglementation font pression pour qu’il n’y ait plus qu’un seul pilote dans le cockpit des avions de ligne, au lieu de deux, d’ici à 2027. Explications avec Iza Bazin, consultante en aéronautique indépendante.
Un avion de ligne piloté par une seule personne, bientôt une réalité ? Une interrogation légitime et loin d’être de la science-fiction puisque « de nombreuses compagnies aériennes et autorités de réglementation font pression pour qu’il n’y ait plus qu’un seul pilote dans le cockpit des avions de ligne au lieu de deux », rapporte l’agence de presse américaine Bloomberg, le 20 novembre 2022. Selon cette dernière, ces nouvelles règles, si elles sont mises en place, permettraient de « réduire les coûts » et « résoudre les problèmes de personnels ». Une évolution nécessaire selon le média américain, qui rappelle que le secteur aérien a été durement touché par la crise du Covid-19.
Plus de 40 pays, dont l’Allemagne, le Royaume-Uni et la Nouvelle-Zélande, ont récemment demandé à l’organisme des Nations unies chargé de fixer les normes en matière d’aviation de réfléchir à la mise en place de vols avec un seul pilote. Dans le même temps, l’Agence européenne de la sécurité aérienne (AESA) travaille également avec les avionneurs pour savoir si les vols réalisés par un seul pilote sont possibles et préparer des règles pour les superviser. « L’AESA a déclaré que ces services pourraient commencer en 2027 », rapporte le média en ligne Korii.
Actuellement, ce sont trois à quatre pilotes qui sont nécessaires dans l’appareil lors des vols longs courrier. Ils alternent entre-temps de pilotage et temps de pause, afin qu’une équipe de deux personnes soit toujours présente dans le cockpit.
« Il y a toujours un deuxième pilote »
« L’idée actuelle serait de passer de trois à deux pilotes, nous explique Iza Bazin, consultante aéronautique indépendante. Il faut être clair, il n’y aura pas qu’un seul pilote aux commandes de l’avion du décollage à l’atterrissage… Ce qui est prévu c’est qu’un deuxième pilote soit présent à bord, mais en repos, sur la banquette du cockpit, lors des phases de croisière de l’appareil. »
La spécialiste précise également que « ce projet ne concerne pour le moment que les avions long-courriers de transport de marchandises et non celui de passagers ». Cette volonté de diminution des effectifs et des coûts pourrait-elle, in fine, se faire au détriment de la sécurité des passagers, si jamais ce projet venait à être étendu aux vols commerciaux ? « Non. Avec deux pilotes, les conditions de sécurité sont réunies, estime Iza Bazin. Il faudra plus faire un travail psychologique et de pédagogie avec les passagers, selon moi. »
Un point de vue que ne partagent pas certains représentants de personnels de vol. « Les gens qui souhaitent prendre cette direction ne pilotent manifestement pas des avions de ligne tous les jours. Quand les choses tournent mal, elles tournent mal très rapidement », estime Tony Lucas, pilote de ligne et président de l’association australienne des pilotes, cité par l’agence Bloomberg.
La tendance à un équipage réduit dans le cockpit n’est cependant pas nouvelle et revient régulièrement sur le devant de la scène ces dernières années. En juin 2021, Marc Rochet, le directeur général d’Air Caraïbes et président de French Bee, deux compagnies de vols long-courriers avait annoncé étudier cette éventualité.
« En court ou moyen-courrier, la décision est déjà prise. On sait bien les coûts qui sont derrière tout cela, les progrès du monde numérique, on sait bien qu’on n’arrête pas ce genre d’évolution, avait-il précisé avant de confirmer avoir déjà entamé le travail sur des vols à équipage restreint. Il y a quelqu’un qui le fera dans le monde et il faudra bien suivre, donc autant être devant. »
« Pas réaliste et surtout dangereuse »
Des déclarations qui à l’époque avaient provoqué une importante levée de boucliers du Syndicat national des pilotes de lignes en France (SNPL). Ce dernier avait estimé que cette idée n’était « pas réaliste et surtout dangereuse ».
« Les technologies ont certes fait d’énormes progrès et c’est en partie grâce à ces derniers que la sécurité des vols s’améliore d’année en année, mais le haut niveau de sécurité atteint par l’industrie du transport aérien repose avant tout sur un pilier fondamental : la synergie et la surveillance mutuelle entre deux membres d’équipage, précisait l’instance en 2021 dans un communiqué. Ce haut niveau de sécurité est en effet indissociable de la présence en permanence au cockpit de deux pilotes entraînés et reposés, en état de vigilance et en capacité de reprendre les commandes à tout moment. »
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